Dans la cadre de la 9ème Semaine de Sensibilisation à l’Infertilité, notre association a organisé une journée de conférence à […]
STEIR raconte
Enfant, je n’ai jamais vraiment joué à la poupée, j’aimais juste les coiffer, mais faire la maman, non, pas pour moi. Adolescente et jeune adulte, j’avais décidé que je n’aurais pas d’enfant, pas envie de reproduire le schéma familial, qui pourtant avec le recul de la maturité, s’est avéré plutôt super. Ah, les crises de l’adolescence !
Étudiante, je fréquentais un mec qui, lorsque j’ai commencé à travailler, est devenu mon compagnon. Étudiante, je n’avais jamais évoqué de projets communs avec lui comme se marier ou fonder une famille car chaque chose en son temps.
Mais voilà que dès que j’ai commencé à travailler, le désir d’enfant s’est imposé, avec une force sidérante pour moi qui étais convaincue de ne pas vouloir d’enfant. Désir qui s’est très vite accompagné d’une sorte de malaise, comme si j’entendais mon horloge biologique qui commençait déjà à me dire dépêche toi, ton temps est compté, sans raison puisque ma maman n’était ménopausée qu’à 55 ans, et moi je n’en avais que 24.
Mais l’envie est là. J’en parle à mon compagnon, il ne réagira pas. Il a 30 ans mais ne sait toujours pas ce qu’il attend de la vie, s’il veut des enfants, s’il veut construire quelque chose de plus solide avec moi. Ça fait un choc car après 5 ans à se fréquenter…
Je finis par le quitter, rencontre un père potentiel. Très vite nous décidons d’essayer de le mettre en route ce petit de nous. Et 2 semaines après notre premier cycle d’essai, j’ai du retard. Je fais un test de grossesse et pas de doute, je suis enceinte, c’est génial !
Insouciante devant ce qui me semble une super preuve de fertilité pour notre couple, je ne change rien à ma vie à part l’alcool qui est proscrit, je fais autant de sport qu’avant, dors toujours aussi peu, ne me ménage en rien. Et tout se passe bien, juste une grande fatigue, mais pas grave ça ! Première échographie, une formalité pour moi même si la gygy ne veut pas prendre la date de conception que je lui donne comme référence car indiquerait un petit retard de croissance. Elle m’explique qu’entre le rapport et la fécondation de l’ovule, il peut s’écouler quelques jours. Bref, je n’insiste pas.
Seconde écho, je tombe sur une personne qui ne parle pas français ou si peu et qui me demandera si la première écho n’a rien mis en évidence d’anormal. Le rapport d’échographie indiquera que tout va bien. Toute fière, j’amène ça à ma gygy le rendez-vous suivant. Elle ne notera elle non plus rien d’anormal. Moi je suis de plus en plus crevée. J’ai arrêté le sport, j’essaie de dormi mais n’y arrive pas. Remontées acides, l’impression que mon bébé me bouffe de l’intérieur. Je suis mal. À 6 mois 1/2 de grossesse, ma gygy l’examine et trouve ma hauteur utérine beaucoup trop faible. Direct, elle me prend rendez-vous chez un de ses confrères quelques jours après. Lui trouve que mon bébé à quelques petites anomalies (cœur, rein) mais n’est pas expert. Il me prend rendez-vous la semaine suivante dans un hôpital référence en terme d’écho anténatale. La on m’annoncera froidement après une demi journée d’échos à passer de mains en mains que mon bébé est foutu, sans prendre de gants, sans s’assurer qu’il y a quelqu’un a mes côtes pour me soutenir et m’aider à encaisser. J’étais venue seule, en voiture. Pour rentrer chez moi avec ma très vieille voiture, il me fallait aller du nord ouest de l’île de France au sud de la région parisienne. Il faisait nuit, il pleuvait, c’était l’heure de pointe. Aujourd’hui je ne sais toujours pas comment j’ai réussi à rentrer chez moi sans avoir d’accident. Mon monde venait de s’écrouler.
La loi à l’époque imposait un délai de réflexion d’une semaine entre l’annonce du problème et l’interruption de la grossesse si c’est cela que l’on souhaitait. Je ne sais pas si c’est encore d’actualité.
Moi j’ai vécu un enfer toute cette semaine là. C’était dur de sentir le bébé bouger et vivre à mon rythme tout en sachant que bientôt il serait mort. Et puis on a envié de croire que les médecins se sont trompés. Mais non, de toutes façons je le sentais au fond de moi qu’il y avait un problème, mais pourquoi ça m’arrivait à moi ? Le pire c’est que c’était déjà visible sur la première échographie un peu, et de façon flagrante sur la seconde. J’en ai voulu à la terre entière. J’en pleure encore aujourd’hui en l’écrivant, 15 ans se sont pourtant écoulés. Cet enfant me manque toujours. Il a maintenant une petite sœur mais le chemin à été long pour y parvenir.
Je vous passe les détails de l’interruption de la grossesse, ça à été inhumain et pourtant dans l’hôpital parisien censé être une référence.
Mais dans cette épreuve, je me consolais en me disant qu’on allait vite remettre un bébé en route et que cette fois je serais mieux suivie, qu’on ne vivrait plus jamais ça. Effectivement nous n’avons plus jamais vécu ça, je ne suis plus retombée enceinte. 9 mois sont passés. J’ai décidé de me tourner vers le service pma de l’hôpital. Vous vous doutez bien que j’ai eu le droit au sempiternel « c’est un blocage psychologique », prenez rendez-vous avec un psy. Malgré tout, on nous a prescrit des examens pour vérifier notre bon fonctionnement.
Résultats, spermogramme catastrophique et pour moi déséquilibre hormonal d’origine indéterminé. Alors on nous programme pour des IAC en nous disant qu’il faut en faire un certain nombre sans résultat pour passer aux fiv. Le balai des IDE, des pds, des écho est lancé. 5 stimulations, une seule insémination. J’ovule toujours trop tôt mais personne ne change mon protocole pour autant. Je n’en peux plus de me battre, surtout que je suis seule à me battre, mon mari ne s’implique plus depuis que j’ai révélé à sa famille qui me mettait en cause pour l’infertilité de notre couple que le problème venait au moins à part égale de lui.
Notre couple bat de l’aile. On vit l’un a côté de l’autre. Je mettrais du temps à demander le divorce car la encore, c’est une bataille et je n’en ai plus le courage. Mais des problèmes d’entente au boulot avec un nouveau chef finiront par me donner le déclic. Je plaque tout.
Retour à la case départ chez papa et maman le temps de trouver un nouveau job. La cohabitation est difficile. Mais j’ai de la chance, ils m’offrent ainsi un nouveau départ. En cherchant du travail, je croise celui qui va devenir mon chéri.
Mais à lui, il me faut lui dire que s’il veut des enfants, il faut qu’il passe son chemin et choisisse quelqu’un d’autre, 10 ans sans utiliser de contraceptifs, je ne me fais plus d’illusions sur ma fertilité. C’est dur à dire à quelqu’un avec qui on a vraiment envie de vivre. Mais je le respectais trop pour le laisser s’engager en gardant ça pour moi.
Il me demandera en mariage peu de temps après. Et pourtant, c’est un père né. Lorsque je le voyais avec ses neveux et nièces, j’éprouvais toujours un pincement au cœur, mélange de douleur de ne pas lui donner d’enfant, et mélange de jalousie de le voir vivre ce manque avec les enfants des autres.
Tout va basculer avec la grossesse de notre voisine. De nos fenêtres, nous voyons sont ventre d’arrondir. Et plus son ventre d’arrondi, plus je vois de la souffrance dans son regard. Alors je craque et direction notre médecin traitant dans un premier temps. Prise de sangs, spermogramme. Spermogramme nickel. Pour moi ça va être la douche froide. Pré ménopause. J’ai 35 ans. Je ne veux pas y croire. Nous prenons rendez-vous dans un centre pma, le plus proche, 90 km de chez nous, ça se corse.
Les examens confirment, on nous propose 4 cycles d’insémination. Les premières fois, j’appelle le labo pour avoir les résultats de la pds. Après, je récupère l’enveloppe au courrier en rentrant du boulot. Il n’y aura pas de miracle pour nous. On nous jette sans même nous rencontrer après la dernière insémination. Mon mari pense qu’ils vont nous proposer autre chose après. Il n’a pas encore compris que tout est fini.
Lorsqu’il me demande ce qu’il en est 3 mois après, je lui explique la situation. Son visage est défait. Alors je lui parle du don d’ovocytes. J’ai eu le temps d’y penser, de savoir si j’étais capable de franchir ce pas. Et je sais que oui. Je ne lui en aurais jamais parlé sinon.
4 jours plus tard, il me posera une seule question, cela me dérange-t-il que ce ne soient pas mes gènes ? Je l’ai aimé pour cette question, parce que son désir d’enfant ne passait pas avant moi, parce que si ça m’avait posé un problème, il aurait renoncé.
Je prends donc rendez-vous au Cecos du centre de pma qui nous suivait, nous ne sommes pas encore prêts à devoir payer pour être parents. Je sais que l’Espagne, la RT, la Grèce propose ce genre de chose mais le coût à de quoi calmer de bien plus aisés que nous.
Notre dossier est accepté mais n’ayant pas de donneuse, il faudra patienter 2 ans. Je franchis le cap de la quarantaine, mais nous profitons de ces 2 ans pour vivre pleinement notre vie. Nous achetons une maison avec un grand jardin. Difficile de ne pas imaginer des cris d’enfants dans ce jardin, mais patience, ça va peut être venir. Il y a aussi cette chambre dans notre nouvelle maison où je n’aime pas entrer. C’est trop symbolique cette chambre en trop.
Vient enfin le jour de l’appel en vu de la synchronisation avec la donneuse. Il y en aura 4 ou 5 de ces appels, à chaque fois la synchronisation est décalée, le temps passe, je réagis de façon curieuse aux médicaments sans que le gygy s’en soucie. Le jour de la ponction, je ne serais pas en phase, nos embryons seront congelés. J’ai la haine la encore car en cherchant sur le net, je trouve ce qui cloche, gygy n’a jamais mentionné le fait qu’il fallait prendre le provames en plusieurs fois dans la journée et à heure fixe. Moi pour ne pas oublier, je prenais tout d’un coup le matin. Sachant que les chances sont moindres avec des embryons congelés, mes espoirs s’effondrent. Suivent 3 transfert de 1 embryon chacun. Rien ne se passe, le miracle c’est pour les autres.
3 mois passent et plus aucune nouvelle du Cecos. Pourtant, nous n’avons pas eu le nombre d’ovocytes promis. Alors j’appelle, je sens bien que je dérange, on ne comptait pas nous en attribuer d’autres. 2 ans d’attente pour 4 ovocytes, j’en ai gros sur la patate, j’insiste sur la promesse faite. On nous rappellera un mois et demi plus tard pour une nouvelle synchronisation. Cette fois je prends bien le provames en plusieurs fois et n’ai pas de mauvaise surprise. Le jour de la ponction, on nous reçoit froidement, on nous a réservé 1 ovocyte, il n’y a pas eu de contrôle de l’endomètre pour moi, on nous prévient que ce sera le dernier qui nous sera attribué. J’ai le droit au minimum quoi, et encore, parce que j’ai râlé.
Les super spermatozoïdes de mon mari feront de cet ovocyte un super embryon. Je vais faire ma pds sans conviction 12 jours après. J’appelle le labo mais sans vraiment écouter la réponse. Et pourtant, c’est positif, pas un super taux, mais positif. Je n’en reviens pas. Mon premier début de grossesse depuis mon bébé couette avorté.
Cet espèce d’embryon de bonheur ne durera malheureusement pas. À 7 sa, petites pertes rosées, un taux de beta hcg qui n’évolue pas super bien… L’échographie 2 jours plus tard nous montrera un cœur qui bat, mais un retard de croissance de l’embryon aussi. Le lendemain, c’est la fausse couche.
Je ne me démonte pas, j’attribue ça à la mauvaise qualité de l’ovocyte compte tenu de l’âge souvent « avancé » des donneuses en France (c’est culotté de dire ça, je les remercie toutes au passage, quelles que soient leurs motivations, je leur tire mon chapeau), j’en discute avec mon chéri, et nous nous tournons vers l’Espagne. Mon utérus a fait ses preuves, je réagis plutôt bien aux médocs, alors avec des ovocytes de jeune, j’ai le sentiment d’avoir toutes mes chances !
Je revois le gygy qui m’a fait l’échographie des 7 sa et qui a constaté la fausse couche avec qui le courant était super bien passé. Il est ok pour m’accompagner, fait la lettre pour la demande de prise en charge des soins à l’étranger, me prescrit les examens demandés par la clinique, prescrit aussi les médicaments pour la donneuse. Bref, sa réaction me donne des ailes. Cette fois ci, je sais que toutes les conditions sont réunies et que cela à marcher, j’en ai la conviction, c’est fort, très fort.
Et cela va marcher. Je ne vous dis pas que la grossesse s’est déroulée sans problèmes, ho que non, mais ma pitchoune est bien là, elle pète la forme et c’est du pur bonheur.
Côté financier, la clinique s’est avérée être une véritable usine, c’était déstabilisant car cela m’avait vraiment donné l’impression de venir là acheter un enfant, alors qu’en France je n’avais jamais eu ce sentiment presque de honte d’entrer dans les critères permettant d’accéder au don. Là d’une certaine façon j’avais le sentiment de me payer presque un caprice parce que j’en avais les moyens tout en étant consciente que ce n’était pas le cas de toutes les femmes qui auraient eu besoin de ce biais là pour parvenir à être maman.
L’autre aspect financier de ma grossesse qui m’a complètement révolté à été de découvrir que le régime sous lequel je travaillais dans l’entreprise de mon mari ne me permettais pas d’avoir le moindre soutien financier en cas d’arrêt de travail, ce qui a été le cas quasiment toute ma grossesse. Et pour parfaire le tableau, l’assurance garantie des revenues que nous avions souscrite en cas d’arrêt de travail mentionnait dans les clauses d’exclusion tout arrêt de travail consécutif à une grossesse obtenue grâce à la pma. J’avoue avoir très mal vécu tout cela, l’impression de ne plus avoir aucun droit ni d’existence, que je n’étais plus qu’une matrice tentant de produire un enfant et qu’on niait mon existence en tant que travailleuse avant, que seules les femmes ayant des enfants naturellement étaient dignes d’avoir un soutien, et que nous pauvres créatures stériles, nous n’avions qu’à nous résigner et travailler pour faire fonctionner le système et permettre à ces femmes fertiles d’avoir elles seules le bénéfice du labeur collectif.
Il y a peu, nous avons décidé d’aller chercher les embryons qui nous restaient, espérant un nouveau petit miracle, un frère ou une sœur pour notre fille. Mais mauvaise surprise, mon gygy s’est avéré être en arrêt maladie longue durée. Il m’a fallu choisir au pif. Et cela n’a pas été concluant, je me suis pris la nouvelle directive de plein fouet. Lorsque je lui ai expliqué la situation et ai demandé à ce qu’elle me prescrive les examens et les médicaments nécessaires au lancement du TEC, j’ai eu pour toute réponse, je ne sais pas si j’ai le droit, je vais me renseigner. J’ai tâté le terrain aussi pour la demande de 100% stérilité et ai obtenu la même réponse, mais dans son regard j’ai lu qu’elle considérait que ce n’étais pas à la société de supporter le coût de ce type de stérilité. Elle a fini par me prescrire les pds et les médicaments, mais le 100% je n’ai pas eu de nouvelles, et inutile de vous dire que je ne lui ai pas demandé de lettre pour ma demande de prise en charge de soins à l’étranger. J’ai essayé de faire passer ça sur la demande pour la fiv do de l’année dernière vu que les embryons qui nous restent en sont issus mais je n’y crois pas du tout.
Voilà mon histoire. J’ai fait un pavé et en suis désolée. Mais je voulais témoigner car je suis maintenant une maman heureuse et gourmande, gourmande au point d’aller chercher ses embryons surnuméraires histoire d’essayer d’être comblée deux fois au lieu d’une.
À toutes celles qui sont dans le doute et qui n’en peuvent plus des échecs, je vous souhaite de connaître ce bonheur, c’est immense !
La société est comme ça. J’ai essayé de cumuler travail et FIV DO en bon soldat que je suis. Grâce aux délais de carence de la sécu (je ne suis pas fonctionnaire), je me suis retrouvée avec des 900 euros de salaire au lieu de 1400 euros ! Et oui bien obligée de prendre des jours pour faire 3 heures de route pour aller au CECOS sans compter le temps des analyses là bas. Je ne parlerais même pas de l’argent perdu pour ma fc. Conclusions, rupture conventionnelle et chômage. Voilà, je vis au crochet de la société, je suis dans ma FIV DO 2, je fais des aller/retour au CECOS et je profite du système mais les gens oublient vite ce que le système nous a fait subir et pourquoi on en arrive là.
Merci pour votre partage car on n’imagine pas à quel point la France peut être arrierée au niveau de la PMA ! Votre parcours est un calvaire, j’ai honte du pays des droits de l’homme dans ces conditions !
Une clause d’exclusion en cas d’arrêt de travail pour grossesse PMA !!! Non mais franchement quelle abomination ! Je suis INDIGNEE !!
Quel parcours, encore une fois on se heurte au dysfonctionnement de la prise en charge médicale en France, je ne comprend que trop ton parcours, j’espère que tu vas pouvoir profiter de ton tec et avoir un nouveau petit bout. Enfin, comme d’hab on a l’impression que la fiv do est une lubie de la femme. Bon courage pour la suite.