Innovations pour améliorer les parcours d’infertilité – Conférence

Virginie RIO, co-fondatrice de l’association collectif BAMP a été invité par Elodie CHAPEL d’Elixir Health, pour intervenir sur la table-ronde : « Amélioration de la prévention de l’infertilité par la donnée : la médecine de précision et personnalisée« , avec France Biotech et FemTech France qui regroupent des start-Up et des PME qui travaillent dans le domaine des technologies de la Santé (healthtech), la santé des femmes, les biotechnologie et les approches numériques de la santé. Nous sommes ainsi du coté de la recherche, des innovations, du développement d’approches numériques de la santé. Cette réunion était organisée à l’hôpital Américain à Neuilly sur Seine.

« Amélioration de la prévention de l’infertilité par la donnée : la médecine de précision et personnalisée« 

Quel est le point de vue de notre association sur ce sujet ?

10 ans que notre association défend l’accès aux innovations médicales, biomédicales pour les personnes en parcours d’AMP, pour mieux diagnostiquer, proposer aux patients de nouvelles approches thérapeutiques, pour mieux prendre en charge et pour que la recherche en médecine de la reproduction et en AMP puisse se développer au service des patients. Nous défendons la recherche (voir notre contribution auprès du Comité Consultatif National d’Éthique en 2018), nous défendons l’autorisation du DPI-A ou de toutes autres méthodes qui permettrait d’améliorer les diagnostics et les obtentions de grossesses (voir toutes nos actions auprès des médias et des politiques à ce sujet). Nous soutenons les approches génétiques et immunologiques de l’AMP en termes de diagnostic et de thérapeutique (voir notre Manifeste).

Mais nous constatons aussi depuis 10 ans que la loi de bioéthique Française et l’administration bloque cet accès à des approches innovantes en médecine de la reproduction et en AMP. Certains dispositifs « Innovants » (comme par exemple Matricelab) ne sont toujours pas sur la liste des actes de biologies qui en permettrait leur remboursement par la sécurité sociale. Certains outils de diagnostic sont interdits par la loi, c’est le cas du DPI-A, ce qui pour nous est incompréhensible. Comment refuser d’optimiser les parcours de FIV, en transférant que des embryons euploïdes une fois après avoir évaluer leur qualité chromosomique via le DPI-A ? La recherche française en médecine de la reproduction peine à obtenir des financements qui pourraient l’aider à avancer sur tous ces aspects de la médecine de la reproduction.

Notre sentiment depuis dix ans c’est que le sujet de la médecine de la reproduction, de l’assistance médicale à la reproduction sont encore des sujets peu ou mal considérés par la société française. Blocages, empêchements, manque de considération, manque de financements.

De quoi ont VRAIMENT besoin les patients en AMP ?

  • d’éviter d’entrer en AMP : champs de la prévention collective et individuelle sur la santé reproductive, sur la fertilité.
  • Santé environnementale pour protéger notre santé et celle des générations futures : faire de la santé environnementale un des piliers principaux de notre Santé Publique, pour préserver notre santé globale. Informations et sensibilisation à tous les ages de la vie pour que ces sujets ne soient plus ignorés.

Une fois rentrés en AMP ils ont besoin :

  • de comprendre pourquoi ils sont infertiles : champ du diagnostic
  • de voir leur projet parental se réaliser rapidement et dans de bonnes conditions : champs thérapeutiques et prise en charge.
  • que la société, le monde du travail considèrent les difficultés intrinsèques à l’infertilité, l’amp, sans les culpabiliser, sans les maltraiter. En considérant l’impact massif et total que l’infertilité et l’amp font peser sur la vie des gens concernés.
  • de temps avec les soignants qui les prennent en charge, de communication, de co-construction des parcours d’AMP et de parentalité.

Sur le long terme :

  • les personnes infertiles sont pour le moment considérés et traités médicalement JUSTE sur le temps de leur désir de grossesse, de parentalité, via l’AMP. Une fois le bébé arrivé ou une fois que les personnes sont sorties de l’amp sans enfant, ils sont noyés dans le tout venant de la santé. Il nous semble essentiel que la santé à long terme des personnes infertiles, soit elle aussi considérée par les politiques de santé publiques. L’information et le suivi médical de personnes infertiles nous semble pour le moment défaillant dans notre système de soin.

A qui et à quoi sert la donnée numérique en santé pour la prévention et la prise en charge ? :

C’était le sujet de la table ronde, de notre point de vue, ce sujet peut s’envisager et se réfléchir sur différents angles.

  • Comme expliqué, plus haut, la médecine de la reproduction et l’assistance médicale à la reproduction s’organisent en France dans le cadre de la santé publique, de la solidarité nationale (prise en charge à 100%), ce qui pour nous est normal et doit être préservé. L’accès à la parentalité via la grossesse ne doit pas dépendre des moyens financiers des futurs parents. Avoir le choix de devenir parents ou pas, est un droit fondamental, il doit donc être protégé. Comme doivent être protégées la santé globale, la santé reproductive, la santé environnementale. Ce sont des objectifs de santé publique qu’il faut soutenir, renforcer, développer.

  • Nous constatons depuis 10 ans que le système de santé en France et donc l’AMP dysfonctionne, (crise des hôpitaux, du système de soin, des financement, système qui doit se réorganiser, pression très importantes sur les services d’AMP), n’est pas assez performant (taux de réussite en AMP, temps passé en AMP, persistance de l’infertilité dite inexpliquée, accès limités aux approches génétiques et immunologiques). Le système n’offre pas toutes les possibilités médicales, biomédicales possibles et recommandés (au niveau international, européen) aux patients sur les quatre aspects (diagnostic, thérapeutique, prise en charge et recherche). Le marché des applications, des biotechnologies, de la E-Santé, tente de répondre à ces « trous dans la raquette » que nous constatons tous.

  • Nous constatons et le dénonçons que la loi de bioéthique, le cadre juridique, les mobilisations des opposants à l’AMP freinent ou interdisent l’accès à des dispositifs innovants, entravent la recherche française, prolongent les parcours d’amp, les rendent compliqués, douloureux. Alors qu’ils pourraient en être autrement avec l’apport justement des innovations biomédicales, des outils innovants en médecine de la reproduction.

  • Pour nous le risque que la santé soit déléguée au secteur lucratif, aux marchés est réel. Le marché mondial de la Fécondation In Vitro augmente de façon significative depuis des années, selon un rapport de Market Research Futures : « le marché mondial de la FIV représentera 22.5 milliard de dollars d’ici 2025« . Et c’est sans compter les dollars des marchés satellites de la FIV, car l’AMP ce n’est pas que la FIV. De quoi allécher les investisseurs de tous poils ! Nous souhaitons donc que les différents acteurs puissent avancer de façon équilibrée. Pour que l’accès à l’information, la sensibilisation, à l’AMP en cas de besoin, ne soit pas conditionnée aux niveaux de ressources des personnes. Il nous semble que le risque existe de voir le service public de la santé, qui traverse une crise profonde, qui doit se réorganiser, sans en avoir ni les moyens humains, ni les moyens financiers. Laisse le marché répondre à ses dysfonctionnements et défaillances.

  • Investir pour la recherche médicale, pour les innovations en médecine de la reproduction est une évidence pour nous, mais pour les patients, pour les chercheurs, les médecins, et pas pour alimenter les comptes en banques des investisseurs.

  • Les données numériques, les big data sont de notre point de vue aussi soumises à ces interrogations : a qui sont-elles vraiment utiles et pourquoi ? Si nous saluons les innovations qui se développent comme par exemple, autour du champs de sécurité de la communication médecins/patients (wistim), du choix de l’embryon à transférer (IM VITRO), de la connaissance de l’environnement immunologique endométrial (Matriclab), nous restons vigilantes notamment sur l’utilité réel de la proposition, et sur les aspects financiers que l’innovation implique pour être utilisée. Si la donnée numérique est destinée à faire progresser la recherche, les diagnostics, les traitement pour les patients, c’est évidemment très positif. Si elles sont utilisées en tant que matière première qui peut être vendue et revendue, pour l’enrichissement de certains, c’est plus problématique pour nous. D’autant que pour l’instant les questions éthiques de confidentialité des données, de la validité clinique ou scientifique, de l’homologation restent sur ces sujets et dans certains secteurs de la E-Santé, à améliorer. Quid aussi des biais des algorithmes ?

  • L’objectif final est que la médecine de la reproduction ne devienne pas la seule et unique manière de faire des enfants. Ni, s’il n’est pas possible d’avoir d’enfant sans le recours à l’AMP, qu’elle soit réservée aux seules personnes qui auraient les moyens de bénéficier des dernières technologies biomédicales, des traitements efficaces et des prises en charge de haute qualité. Pour conclure, il y a une urgence importante à mettre tout en œuvre pour inverser les courbes de l’infertilité mondiale et Française.

Cette table ronde a rassemblée :

  • Nathalie MASSIN responsable du centre d’AMP du CHI de Créteil. Elle a parlé de l’apport des données numérique dans l’évaluation de la durée des parcours des patients au sein du centre d’AMP de leur première consultation à leur sortie. Permettant ainsi d’informer les nouveaux patients au regard de leur dossier médical, de la potentiel durée de leur parcours et du nombre de tentatives avant d’avoir une grossesse. Informations très intéressantes pour les patients pour pouvoir se projeter dans le parcours et ne pas juste être dans l’incertitude la plus totale.
  • Caroline GORGES qui a présenté l’intérêt de l’application FREYA pour la sensibilisation à la fertilité. Avec la possibilité pour les personnes de répondre à un questionnaire d’évaluation en fonction de leur projet (bilan de fertilité, projet de maternité, information générale sur la santé féminine, sur les symptômes féminins).
  • Monsieur JONVEAUX de l’Agence de la biomédecine sur l’utilisation des données de la sécurité sociale pour engager des analyses et des études sur la santé des femmes et des enfants en FIV par exemple. Le recueil des données fournis par les centres d’AMP pour faire le bilan chaque année de l’activité d’amp en France.
  • Emmanuel DULAC pour IGYXSOS biotherapeutics : présentation très intéressante autour du développement d’une molécule qui permet de traiter les femmes et LES HOMMES infertiles. Nous avions déjà entendu parlé de ce projet il y a quelques années lors d’un congrès FFER à Tours
  • Arnaud LAMAZIERE pour ALIFERT plateforme de test en ligne, accessible au grand public. Pour l’information des personnes qui s’interrogent sur leur fertilité, à partir d’une prise de sang et de données anthropométriques, les personnes reçoivent une information précise sur les facteurs métaboliques et nutritionnelles dans leurs fertilité. L’information sur l’impact de l’alimentation et de l’hygiène de vie sur la fertilité est nécessaire pour éviter les inquiétudes inutiles ou pour permettre des ajustements pour les personnes qui souhaitent améliorer leur fertilité.

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